Grandcamp

Devant l'église, M. Chardon, répétant des gestes faits des milliers de fois sur son bateau et jamais oubliés, noue des bouquets de fleurs sur un énorme chalut. On attend la fin d'un baptême pour le hisser du haut de la tour, devant le porche. Le vent l'emporte, et il faut appeler des renforts en haut du clocher et au bas des marches pour le retenir, pour le tenir en place et puis l'arrimer aux poteaux de bois. Mme Chardon, une canne à la main, donne encore les ordres - plus haut à gauche, un peu à droite -, elle s'est fait mal au dos ce matin, en installant la crèche, mais elle continue son travail, elle ne sait pas encore qu'elle s'est cassé la clavicule.
Partout les guirlandes de fleurs commencent à s'étirer le long des rues, jaunes et vertes au musoir, jaunes et violettes rue Aristide Briand, roses et bleues dans la petite rue de l'Orangerie. Devant les vieilles écoles, on met les dernières touches à l'autel de la Vierge Marie, dont la statue émerge d'une barque blanche.
Descendant la côte de Maisy, une grue mécanique transporte un énorme globe terrestre, que quatre hommes retiennent fermement avec des cables d'acier pour que le vent ne le mette pas en orbite. Ils traversent tout le village, jusqu'au musoir. Là, on se réunit au café pour discuter de sa mise en place, haut au-dessus de la rue.
D'autres grues apparaissent, et on installe un Neptune à la barbe de fleurs brunes, et une voile décorée de cantiques, sous le regard amusé des promeneurs et les encouragements de Monsieur le Maire. Les opérations sont délicates, et il y a autant de chefs de chantier que d'ouvriers, perchés sur leurs échelles, sur un escabeau, ou dans le panier de la grue.

Dans la rue de la Libération, du côté de la poste, sur la route de Maisy, on s'affaire tard dans la nuit, ici des fleurs jaunes et bleues accrochées à des filets de pêche étendus le long des trottoirs, là de longues guirlandes qui s'envolent dans les rafales de vent.

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